Déconditionner des comportements et surmonter les émotions qui nous parasitent, tels sont les apports de l’Emotional Freedom Technique. En travaillant sur les émotions au moyen de tapotements sur le visage et sur le corps. – Christiane Thiry
J’arrive chez Fabienne Doyen, senior trainer coach à l’institut BAO-Elan Vital formée à l’EFT un soir pluvieux de novembre. Elle m’accueille à l’étage dans un petit nid douillet et chaleureux où je m’installe confortablement. « L’EFT, cousine de l’acuponcture, mais sans les aiguilles, a été créée en 1991 par Gary Craig, médecin américain qui s’est rendu compte que le travail sur les méridiens pouvait soulager des personnes souffrant de troubles psychiatriques. » précise d’emblée la coach. « L’outil qu’il a développé vise à stimuler certaines zones du corps qui correspondent à certains méridiens par des petits tapotements. Pourquoi ces points-là et pas d’autres vu que les méridiens, comme les vaisseaux sanguins, circulent partout dans le corps ? Parce qu’il faut des points qui affleurent et sur lesquels des tapotements sont suffisants. Des points qui ne nécessitent pas d’aller en profondeur avec des aiguilles et qui, en outre, sont ceux qui induisent dans le corps calme et détente car ils agissent sur le système nerveux parasympathique qui est celui qui invite à voir les choses sereinement, à se détacher. »
Une approche holistique
« La technique, précise Fabienne, coach PCC ICF et coach énergétique, consiste à réaliser ces tapotements pendant qu’on évoque par la pensée et par la parole un événement stressant qui, en temps normal, fait intervenir le système nerveux sympathique, celui de la vigilance, prêt à réagir au danger potentiel. Cela permet de décongestionner quelque chose qui est stocké au niveau inconscient dans le cerveau. Ainsi, dès que l’on vit quelque chose de stressant qui ressemble de près ou de loin à quelque chose qui a été vécu comme tel dans le passé, cela provoque un branlebas de combat, une production d’hormones. L’objectif de l’EFT, c’est d’enlever l’encodage qui fait que ce genre d’événements est tout de suite catalogué comme stressant alors qu’aujourd’hui, rationnellement, en prenant de la distance, il n’y a pas de raison de se stresser pour cela. Avec l’EFT on peut traiter dans l’immédiat des émotions qui montent et qu’on veut calmer, on peut travailler sur des souvenirs d’événements survenus hier comme il y a 50 ans et on peut aussi travailler sur des projections d’événements futurs. On peut également traiter des douleurs d’ordre neurologique.»
Une séquence simple
Fabienne m’explique que la séance s’ouvre par la phrase : « Même si j’ai ce problème je l’accepte profondément », prononcée en tapotant trois fois le premier point, au centre du visage, entre les sourcils, le deuxième au coin de l’œil bien sur l’os et le 3e toujours en suivant l’os, juste sous l’œil, le 4e sous le nez, le 5e sous la bouche. Puis on continue à descendre, les points suivants sont sur le corps, dans le creux juste en dessous des clavicules, le 6e est en dessous de la poitrine, à la verticale des mamelons et enfin le 7e est sous le bras, à l’horizontale. Il y a aussi des points sur la main, là où l’ongle et la peau se rejoignent, on tapote doigt par doigt en évitant l’annulaire déjà stimulé par les tapotements sur le corps. Quel que soit l’endroit où on a mal ou les peurs que l’on éprouve, ce sont toujours les mêmes points qui sont tapotés et la séquence est toujours la même », m’explique la coach. « Ce qui change, c’est ce sur quoi on se concentre pendant les tapotements.»
Le choix du sujet
« Il est important de choisir un thème précis », m’annonce Fabienne. J’opte pour la peur que j’éprouve en avion lors de grosses turbulences. Celle-ci a émergé après la naissance de ma fille aînée et s’est renforcée au fil du temps. « Quand tu es dans l’avion et qu’il y a des turbulences, de quoi as –tu peur ? » me demande-t-elle. J’ai peur de mourir et de laisser mes filles seules, peur de lâcher prise aussi, de perdre le contrôle. En outre ayant vécu de près la mort de personnes très proches, je suis conscience qu’elle peut advenir à tout instant. « Et quel lien fais-tu avec la peur dans l’avion ? » poursuit Fabienne. Je lui réponds que J’éprouve le même sentiment d’impuissance, face à une situation que je ne contrôle pas, persuadée que je ne peux faire confiance qu’à moi-même. À la question de savoir quand cette peur a été la plus forte, je réponds que c’est quand le père de mes filles et moi nous trouvions dans un avion pris dans un orage et où j’ai senti qu’à un moment donné lui aussi était moins à l’aise. Ce qui voulait dire que j’avais des raisons plus objectives d’avoir peur. C’était il y a une trentaine d’années. « Et qu’en reste-t-il aujourd’hui au niveau émotionnel ? » m’interroge la coach. L’impression que je ne peux me reposer que sur moi. Or, dans un avion, j’ai le sentiment que je ne peux pas lâcher, il y a quelque chose d’encore plus incontrôlé que ce que je gère au quotidien. « Et quelle émotion ressens-tu en me racontant cela ? » De la peur et une forme de colère d’être seule au monde avec mes peurs, de la déception aussi de ne pouvoir me reposer sur qui que ce soit.
Une formule qui concentre le vécu
« Il est important que tu puisses te concentrer sur ce que tu vis aujourd’hui », poursuit Fabienne. « Tu n’es plus dans l’avion il y a trente ans, mais tu sens qu’il y a encore une pointe de déception et de colère en toi car tu ne peux te reposer sur personne, pas même sur le pilote ou les hôtesses. Si tu devais résumer cette masse d’informations, comme si c’était un film que tu regardes, comment s’appellerait ce film et sur une échelle de 0 à 10, à quel niveau situerais-tu ta déception, ta peur et ta colère? » Le film s’appellerait Trou noir et mes émotions se situent entre 8 et 9 sur 10.
Reformuler le thème
Je commence les tapotements en prononçant « Même si j’ai cette peur dans l’avion, je m’accepte complètement et profondément » et puis je répète au fil de la séquence des tapotements les phrases énoncées par Fabienne et qui reprennent ce que je viens de dire. « Le trou noir, l’avion, les turbulences, la peur, je ne peux compter sur personne. Déception, je dois toujours tout prendre en charge, je ne peux m’appuyer sur personne. Il n’y a que moi. Je dois toujours tout assumer. »
Après le 7e point, Fabienne me demande comment j’ai vécu la séquence et où j’en suis sur l’échelle de mes émotions. Je réponds qu’il y a quelque chose de libératoire dans le fait de nommer ses émotions. Je me sens moins en colère. « Parfois quand la colère diminue, il y a d’autres émotions qui deviennent visibles », commente-t-elle. « Quelle est la colère que tu éprouves maintenant ? » Je crois que c’est de ne pas m’être sentie protégée à des moments où j’en avais besoin. J’ai eu le sentiment de devoir être dure pour survivre, de devoir prendre sur moi.
Sous la colère
« Quel est l’événement le plus marquant où tu t’es rendu compte que tu devais assumer même si ce n’était pas ton rôle ? » Le jour où ma sœur cadette est morte sous mes yeux alors que j’étais seule sur place. « Et physiquement que ressens-tu ? » De la tension dans mes mains comme si je devais tenir le monde pour qu’il ne s’effondre pas. Et quel est le mot-clé que tu choisirais pour résumer ce que tu viens de dire? C’est s’agripper. Et j’entame une seconde séquence en évoquant le thème s’agripper à chaque tapotement. « S’agripper, s’agripper à la vie,, je n’ai pas le droit de lâcher, c’est trop dangereux ! La colère ! Pourquoi c’est toujours moi ? Personne pour la protéger ou pour protéger les autres, à part moi. La colère dans mes mains, crispées. » À la fin de la séquence, je me sens plus légère, consciente d’avoir vécu de nombreuses années de tension et surprise du lien établi avec la mort de ma sœur. « En EFT on travaille avec ce qui vient pendant la séance. Ce n’est pas pour rien que ton inconscient lâche cette info juste au moment où on dit que l’on va travailler sur la peur de l’avion. » Je lui dis que ce qui reste pour moi, c’est un sentiment de non protection, une croyance que je dois me débrouiller seule si ce n’est qu’aujourd’hui, avec mon mari, je me sens protégée différemment. Par sa douceur, son empathie.
Le début d’un processus
La séance arrive à son terme. « Il faut laisser travailler ce que tu as remué », clôture Fabienne. «Le but est de nettoyer peu à peu le système énergétique de toutes ces émotions liées à des événements passés. » Je sais que le travail va être long, mais je suis confiante. « Pendant des années, tu as forgé une carapace qui t’était utile, fondée sur ta croyance que tu devais tout assumer seule, et maintenant que tu en as moins besoin, elle est bien là », exprime Fabienne. « Il va falloir du temps pour l’adoucir, l’ameublir pour que, quand il arrive quelque chose, tu puisses le prendre, pleurer s’il faut pleurer, et ne pas attendre quelques années pour libérer ce qu’il y a à libérer. » Quelques jours plus tard j’ai pris l’avion pour Marrakech et j’ai fait la séquence à plusieurs reprises pendant le vol. J’ai prononcé les mêmes phrases, comme pour m’en détacher peu à peu. Je ne sais si la météo était particulièrement clémente ou les turbulences moins présentes, mais j’ai vécu le vol dans le calme et la douceur, bien blottie contre mon mari.
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